Les parties Politiques relaient le message des salariés et des syndicats unis derrière Alain Bourgeois
Le NPA
Nous rencontrons Alain Bourgeois (51 ans, délégué CFDT de la Société
Nouvelle de Remorquage du Havre) sur le port du Havre, devant les bureaux de la
SNRH, là où il s’est installé pour mener une grève de la faim depuis le 13
août.
L’installation de la SNRH fait suite à la libéralisation des services
portuaires au niveau européen : depuis 2006, l’entreprise intervient sur
le port du Havre au côté de Boluda (ex-Abeilles).
La SNRH a répondu à un cahier des charges avec des obligations, liées en
particulier au fait que l’activité portuaire au Havre est continue, que la mer
soit haute ou basse, et que cela implique une disponibilité 24/24h. Or la SNRH
ne respecte pas ses obligations car elle n’a pas adapté son organisation du
travail à cette situation du travail en continu.
Ainsi Alain Bourgeois se voit systématiquement refuser ses demandes de 12
jours de congés consécutifs (de droit) alors que l’inspection du travail est
déjà intervenue plusieurs fois vis-à-vis de la SNRH pour lui rappeler la
réglementation en matière de congés. Plus généralement, il dénonce les
conditions de travail à bord des bateaux, notamment en terme d’effectifs et de
temps de travail. Chez Boluda (ex-Abeilles), on compte une centaine de marins
pour 7 remorqueurs alors qu’à la SNRH, les marins sont une soixantaine pour 6
remorqueurs… soit 4 hommes pour un poste chez l’un et 2 chez l’autre !
La composition de l’effectif de l’entreprise rend les luttes collectives
très difficiles : de nombreux militants ont quitté la SNRH ces dernières
années. Aujourd’hui Alain Bourgeois est très isolé dans une entreprise qui a
choisi l’épreuve de force pour faire plier le militant. Prêt à dépenser des
sommes folles en frais d’avocats, le patron n’a peur de rien : création de
syndicat maison, pétition contre le syndicaliste, refus de suivre les
observations de l’inspection du travail, répression des militants etc.
Résultat : les salariés ont peur. De plus, pour bon nombre d’entre eux, il
s’agit d’une reconversion professionnelle après des années comme
marins-pêcheurs. Ils passent 14 jours à bord puis rentrent chez eux, n’habitant
pas au Havre. Il est très difficile dans ces conditions de construire une lutte
collective. Selon Alain Bourgeois, une grève « classique » n’est pas
possible dans ces conditions.
Mais la solidarité qui est en train de se construire autour d’Alain rend la
stratégie patronale périlleuse : militant CFDT, il est soutenu par les UL
CFDT et CGT, par le syndicat des travailleurs portuaires CGT, la CGT-EDF, par
la FGTE-CFDT, par ATTAC ou les partis de gauche (PCF, PG, NPA).
C’est à l’administration (Affaires maritimes, sous-préfecture, direction du
Port, inspection du travail) de faire respecter les droits des salarié-e-s de
la SNRH : l’agrément de l’entreprise doit être suspendu pour non-respect
du code du travail. Or l’administration maritime prend aujourd’hui le parti du
patron de la SNRH puisqu’elle envisage de réviser les normes en matière
d’effectifs dans le remorquage. Ce qui aurait pour effet d’aligner les
conditions de travail de l’ensemble des salariés du secteur sur celles de la
SNRH ! Il y a fort à parier que les salariés de Boluda ne resteront pas
sans rien faire, eux qui ont déjà subi des réductions d’effectifs (37 postes
supprimés en février).
Plus largement, c’est bien la mise en concurrence et la privatisation à
l’échelle européenne des activités portuaires qui est au cœur de ce conflit. La
situation de la SNRH au Havre n’est pas isolée et d’autres ports doivent
s’attendre à connaitre une évolution comparable : la recherche du profit
n’est pas compatible avec le développement d’activités maritimes sûres et
respectueuses des droits des salariés comme de l’environnement.